La Francoise en CASAMANCE

suite : Coucounet n°5 - mi-novembre 2002 -De Ziguinchor à Kafoutine en passant par les bolongs

> Finalement nous sommes content d'appareiller vers le sud le 27 octobre vers La Casamance, nous avons décidé de ne pas naviguer de nuit, il y a tellement de lignes et de filets mouillés partout que c'est un véritable slalom que nous effectuons, nous faisons une escale pour la nuit à SALLY, une ville conçu pour les touristes blancs avec chaînes d'hôtels, piscines, cocotier et tout le reste comme sur les magasines. bon c'est pas vraiment ce qu'on venait voir !

 Appareillage au matin, nous nous dirigeons vers la rivière SALOUM, la passe est  difficile à négocier, nous n'avons que 2 mètres d'eau à l'entrée et il y a quelques vagues, nous prenons l'habitude de naviguer dérives descendues à 1 mètre pour protéger nos safrans et nos hélices qui sont à 80 centimètres de profondeur, en arrivant au village de DJIFERE, le dépaysement est total, nous avons vraiment l'impression de commencer notre voyage, pas de touriste, nous retrouvons la vie africaine dans les cases, comme il y a plusieurs siècles, les choses n'ont pas bougées, nous restons un bon moment avec un  charpentier de marine qui construit une pirogue, nous sommes stupéfait par son habileté, ce qu'il réalise compte tenu du peu d'outils qu'il possède est extraordinaire.
 Au matin nous voulions faire cap vers la Casamance mais malheureusement un vent de Sud s'est levé pendant la nuit, d'un commun accord nous décidons de tenter le passage vers le sud par les rivières et belons qui quadrillent toutes cette région jusqu'à La Gambie, nous remontons la rivière SALOUM, pour rejoindre le marigot de Sangako, c'est un émerveillement, la vie sauvage, des oiseaux en grand nombre, des villages hors du temps, des passages difficiles à la limite de l'échouage, La Françoise passe devant parfois au ralenti près à faire marche arrière, Galatée et Vanikoro reste derrière bien dans le sillage
 Nous rejoignons au bout de 2 jours la rivière Dambios, que nous remontons sur quelques milles pour descendre la Bandiala qui nous ramènera vers la sortie de La Gambie.

 Au premier village rencontré (TOUBAKOUTA), le paysage est tellement magnifique que nous y resterons 3 jours mouillé devant un hôtel de pêcheur possédant un joli petit ponton.
 Evidemment les femmes ne peuvent s'empêcher d'acheter quelques bout de bois
complémentaires d'ailleurs fort jolies (masques, girafes, rhinocéros et autres)  pour décorer les bateaux.


 Bon il est temps de ce décider à descendre vers La Casamance, nous sommes attendus impatiemment, nous nous arrachons enfin à cette merveilleuse région, nous mettons le cap vers la sortie ouest de la rivière Gambie pour essayer de trouver un mouillage pour la nuit, nous désirons rentrer le lendemain, de jour en Casamance, la passe y est paraît il difficile ? déferlantes, banc de sable, épaves, nous sommes un peu inquiet de ce qui nous attend ?

 Nous passons la nuit pas très loin de l'épave du JOLLA (prononcé ici DIOLA)
 Je tiens à faire une parenthèse sur le naufrage du JOLLA pour bien faire comprendre de quelle manière nous avons été reçu ici à ZIGUINCHOR.

 Le JOLLA a appareillé de Ziguinchor le soir avec à son bord plus de 2000 passagers le bateau était conçu pour transporter 550 passagers, 1600 billets ont été vendus, 94 militaires voyageant gratuitement avec leur famille était à bord, près de 400 à 500 jeunes étudiants effectuant leurs études supérieures partaient pour rejoindre leur écoles à Dakar, tout ces jeunes portaient l'espoir d'un avenir économique meilleur pour la région ; un nombre inconnu de passagers sans billet était également à bord.
 Le JOLLA a effectué sa dernière escale devant l'ile de Karabane pour embarquer les derniers passagers, un groupe de jeune partant pour l'école, en début de nuit alors que le bateau faisait route au nord, il semble qu'un orage à éclaté et qu'une pluie importante est repoussée les passagers sur tribord désireux de se mettre à l'abri, les cales étaient vides pour une fois et ne pouvaient donc pas participer au lest,  un vent un peu fort par le travers n'a eu aucune difficulté à chavirer le bateau compte tenu du déplacement de masse sur tribord.
 Le bateau s'est retourné quille en l'air.
 La grande majorité des personnes s'est retrouvée coincée dans la coque, quelques uns on eu la chance de se retrouver à la mer, mais il fallait nager et aucun appel de détresse n'avait été envoyé, certains ne passeront pas la nuit, comme ce français qui tenait la main de son amie toute la nuit, en essayant de nager, malheureusement elle est morte d'épuisement, il s'en sort tout seul.
 Les gens ne sont pas tous mort noyés au moment du chavirage ; ceux qui sont restés coincés dans la bulle d'air sont morts certainement d'étouffement au bout d'un temps très long.
 Le pays ne possède aucun moyen pour leur venir en aide, le bateau finit par s'échouer à l'envers par 8 à 10 mètres de fond, il est actuellement coulé à cet endroit. Il est très difficile de récupérer les corps, 250 seulement seront récupérés. De temps en temps encore actuellement des bateaux de pêche font de macabres découvertes.
 64 survivants pour plus de 2000 victimes la plus grande catastrophe maritime de tout les temps, les victimes ne sont pas des milliardaires, d'un paquebot de luxe effectuant sa première traversée de l'atlantique mais des gens simples et pauvres s'entassant sur le seul bateau permettant de sortir de cette région enclavée.

 La ville est traumatisée, la majorité de la population a perdu un être cher, un ou plusieurs parents, enfants ou des amis, Les musulmans et chrétiens viennent se recueillir régulièrement  ensemble sur le quai du JOLLA.

 Après cette nuit passée au mouillage près de l'épave, durant laquelle il a été difficile de s'endormir sans penser à ce que se naufrage à dû être, nous sommes arrivée à ZIGUINCHOR avec les médicaments et nous avons reçu un accueil merveilleux grâce à Loulou Sebihi de l'association LOZAFRIQUE, qui avait prévenu les autorités locales, le maire, le président du Conseil régional etc, celles ci tenait à ce que nous prenions la place à quai du JOLLA car nous représentons pour eux un renouveau.
 Un bateau est parti par la mer et tous leurs espoirs ont été détruits,  3 voiliers chargés de médicaments arrivent par la mer et font renaître dans la population une petite lueur, c'est pourquoi ils ont tenus à ce que nous prenions la place du JOLLA.

 Les gens ici sont adorables, leur pauvreté est grande, leur besoin énorme, ce que nous pensions être un petit don fait sans difficulté est pour eu un bien précieux.

 J'invite tous les voiliers à venir visiter cette région un peu en dehors de la route classique des alizés mais tellement intéressante à visiter, la navigation dans les belons est très facile, la passe d'entrée en Casamance est à démystifié, très bien balisée elle ne pose aucune difficulté particulière. Vous pouvez embarquer quelques petits colis dans vos cales, pour l'association KAFO'SAZE  tel 04 90 26 95 05 ou LOZAFRIQUE (Loulou SEBIHI tel 00 221 936 95 52)
 Vous serez ici les bien venus et ne regrettez pas votre escale.

 Nous allons repartir vers les belons en direction de Kafoutine passer quelques jours puis retour à Dakar.

 A bientôt pour de nouvelles aventures

 Michel Laurence et David

photos Michel Verdier